accident St-Michel en Grève (22) 2 novembre 2013
Posté : lun. 4 nov. 2013 19:15
Ca fait pas mal d'années que je ne suis plus actif sur ce forum mais l'occasion me paraissait opportune : j'ai fini aux urgences samedi dernier après avoir été catapulté par mon aile, pourtant larguée, sur un mur en granit.
Je remercie tous ceux qui m'ont aidé alors que j'étais allongé sur le sol et qui se reconnaîtront sur ce forum. Merci pour les couvertures de survie en attendant les pompiers. Merci à tous ceux qui m'ont rassuré, à ceux qui ont récupéré mon aile, à Erwan LB qui m'a accompagné aux urgences, etc.
Et puis je pense à l'image du kite qui est toujours la grande perdante quand ce genre d'accident arrive, quelles qu'en soient les raisons. En l'occurrence un lampadaire arraché par mon aile une fois le leash sectionné après mon choc extrêmement violent contre le mur de pierre, ça ne fait forcément pas bonne impression. A ce propos le maire de St-Michel a été très attentionné puisqu'il attendait les secours et les procédures sont engagées afin que ma RC prenne en charge les dégâts matériels. Quant aux pompiers qui débarquent sur une plage, ils cristallisent malheureusement le danger inhérent à ce sport.
Je voudrais maintenant revenir sur les conditions de samedi et les circonstances de l'accident afin que nous puissions tous en tirer des enseignements. Le vent annoncé était de l'ordre de 15-20 nds sur windfinder (plutôt 30 nds à Trébeurden qui est plus exposé). Après quelque hésitation entre ma 8m et ma Takoon Air 14m, je choisis la plus grande. Je suis bien toilé mais pas surtoilé. D'ailleurs je constate autour de moi que les 9 sont petit à petit remplacées par des 12 à 15 m. Je précise que je pèse 75 kg et que je kite de façon irrégulière depuis 12 ans, habituellement dans des ventes de 15 à 30 nds.
Après deux heures de nav, la marée est haute, il reste entre 60 à 100 m de plage avant le mur de la route. Un gros grain obscurcit le ciel. Le vent est onshore. Je suis prêt du bord. Je cale mes pieds dans le sable avec mon aile en bord de fenêtre choquée au max et cherche quelqu'un qui pourrait m'aider à atterrir (je suis en 4 lignes avec leash sur une ligne arrière.
A ce moment, le vent passe je pense en quelques secondes de 22-23 nds à plus de 30 nds (je serais tenté de dire vraiment plus de 30 nds mais je ne sais pas précisément). Je sens immédiatement que mon aile ne tiendra pas en bord de fenêtre le vent est trop fort et instable. Je commence à être entraîné. Donc je largue mon aile immédiatement !
Et c'est précisément à ce moment que tout s'accélère. Loin d'être tuée, la puissance de l'aile est au contraire décuplée. J'ai juste le temps de gueuler pour ne pas faucher un autre kiter qui se tient sur le sable. Je vois le mur arriver à une vitesse vertigineuses et BAM ! J'ai l'impression d'exploser tandis que je retombe sur le dos, désolidarisé de mon aile qui poursuit seule sa route et provoque les dégâts que j'ai évoqués. Je pense tout de suite au fauteuil roulant.
Ensuite je mets quelques dizaines de secondes à reprendre mon souffle. Je suis conscient. Mais je ne sais pas dans quel état. J'ai très mal au dos. Je préfère donc rester couché en attendant sagement les secours. Bien que je sente et bouge les extrémités de mon corps, j'ai vraiment peur de mon état, j'ai des fourmis aux pieds. Les gens sur la plage sont supers avec moi comme je l'ai décrit avant. Un pompier en civil me pose les quelques questions qui accélèreront ma prise en charge par l'équipe de secours qui est en route.
Ensuite les pompiers arrivent avec un médecin. Ils me maintiennent bien à plat, me donnent de l'oxygène, me débarrassent de mon harnais et de ma combi, m'administrent une bonne dose de calmant en intra-veineuse et me conduisent à l'hôpital de Lannion pour un scan. Une demie heure plus tard, c'est la très bonne nouvelle que j'espérais : je n'ai rien de grave.
Que s'est-il passé ? Il faudra que je vérifie quand je serai en état de déployer mon aile et ce qui reste des lignes. Je pense que mes pré-lignes étaient légèrement trop courtes, or le leash d'aile étant fixé en début de ligne arrière, ce sont les pré-lignes qui créent le différentiel qui permet à l'aile de se mettre en drapeau. Le différentiel étant trop court, il restait un reste d'arche qui a maintenu un résidu de puissance. Ce résidu de puissance, combiné au fait que l'aile est venue naturellement se placer en pleine puissance de la fenêtre, combiné aux kite loops qui ont du se produire, combiné à une grosse rafale, tout ça a démultiplié la traction de l'aile au lieu de la tuer.
Je précise que les réglages de la barres et donc des pré-lignes étaient à l'origine ceux d'une Skoop 17 m dont j'étais persuadé que la longueur du bord d'attaque était plus importante que celle de l'air 14 m... vus les événements de samedi, je n'en suis plus toujours aussi persuadé. Je serais intéressé de connaître ce qu'ont vu les témoins. Après tout cette version des faits n'est pas établie, c'est juste ce que je pense.
Les enseignements que j'en tire :
- vérifier régulièrement de manière complète les dispositifs de sécurité. Je vérifiais toujours le déclenchement du largueur. Et je m'exerçais à l'attraper pour que ça devienne un réflexe. Il aurait fallu que je largue dans un vent médium pour prendre réellement conscience que le résidu de puissance que gardait l'aile était potentiellement dangereux. Une aile moderne devrait a priori être plus sécurisante ;
- toujours surveiller le ciel pour anticiper les bourrasques le plus tôt possible ;
- tout cela a fortiori à marée haute quand les marges de sécurité diminuent.
C'est toujours une combinaison de risques qui aboutit à un accident. J'ai eu beaucoup de chance. J'e souhaite que cette expérience désagréable servira aussi à d'autres kiters.
J'espère à bientôt sur les spots de Bretagne de Vendée et d'ailleurs !
R1
PS : merci pour l'accueil des riders du coin. Je n'ai pas eu le temps de dire au revoir...
Je remercie tous ceux qui m'ont aidé alors que j'étais allongé sur le sol et qui se reconnaîtront sur ce forum. Merci pour les couvertures de survie en attendant les pompiers. Merci à tous ceux qui m'ont rassuré, à ceux qui ont récupéré mon aile, à Erwan LB qui m'a accompagné aux urgences, etc.
Et puis je pense à l'image du kite qui est toujours la grande perdante quand ce genre d'accident arrive, quelles qu'en soient les raisons. En l'occurrence un lampadaire arraché par mon aile une fois le leash sectionné après mon choc extrêmement violent contre le mur de pierre, ça ne fait forcément pas bonne impression. A ce propos le maire de St-Michel a été très attentionné puisqu'il attendait les secours et les procédures sont engagées afin que ma RC prenne en charge les dégâts matériels. Quant aux pompiers qui débarquent sur une plage, ils cristallisent malheureusement le danger inhérent à ce sport.
Je voudrais maintenant revenir sur les conditions de samedi et les circonstances de l'accident afin que nous puissions tous en tirer des enseignements. Le vent annoncé était de l'ordre de 15-20 nds sur windfinder (plutôt 30 nds à Trébeurden qui est plus exposé). Après quelque hésitation entre ma 8m et ma Takoon Air 14m, je choisis la plus grande. Je suis bien toilé mais pas surtoilé. D'ailleurs je constate autour de moi que les 9 sont petit à petit remplacées par des 12 à 15 m. Je précise que je pèse 75 kg et que je kite de façon irrégulière depuis 12 ans, habituellement dans des ventes de 15 à 30 nds.
Après deux heures de nav, la marée est haute, il reste entre 60 à 100 m de plage avant le mur de la route. Un gros grain obscurcit le ciel. Le vent est onshore. Je suis prêt du bord. Je cale mes pieds dans le sable avec mon aile en bord de fenêtre choquée au max et cherche quelqu'un qui pourrait m'aider à atterrir (je suis en 4 lignes avec leash sur une ligne arrière.
A ce moment, le vent passe je pense en quelques secondes de 22-23 nds à plus de 30 nds (je serais tenté de dire vraiment plus de 30 nds mais je ne sais pas précisément). Je sens immédiatement que mon aile ne tiendra pas en bord de fenêtre le vent est trop fort et instable. Je commence à être entraîné. Donc je largue mon aile immédiatement !
Et c'est précisément à ce moment que tout s'accélère. Loin d'être tuée, la puissance de l'aile est au contraire décuplée. J'ai juste le temps de gueuler pour ne pas faucher un autre kiter qui se tient sur le sable. Je vois le mur arriver à une vitesse vertigineuses et BAM ! J'ai l'impression d'exploser tandis que je retombe sur le dos, désolidarisé de mon aile qui poursuit seule sa route et provoque les dégâts que j'ai évoqués. Je pense tout de suite au fauteuil roulant.
Ensuite je mets quelques dizaines de secondes à reprendre mon souffle. Je suis conscient. Mais je ne sais pas dans quel état. J'ai très mal au dos. Je préfère donc rester couché en attendant sagement les secours. Bien que je sente et bouge les extrémités de mon corps, j'ai vraiment peur de mon état, j'ai des fourmis aux pieds. Les gens sur la plage sont supers avec moi comme je l'ai décrit avant. Un pompier en civil me pose les quelques questions qui accélèreront ma prise en charge par l'équipe de secours qui est en route.
Ensuite les pompiers arrivent avec un médecin. Ils me maintiennent bien à plat, me donnent de l'oxygène, me débarrassent de mon harnais et de ma combi, m'administrent une bonne dose de calmant en intra-veineuse et me conduisent à l'hôpital de Lannion pour un scan. Une demie heure plus tard, c'est la très bonne nouvelle que j'espérais : je n'ai rien de grave.
Que s'est-il passé ? Il faudra que je vérifie quand je serai en état de déployer mon aile et ce qui reste des lignes. Je pense que mes pré-lignes étaient légèrement trop courtes, or le leash d'aile étant fixé en début de ligne arrière, ce sont les pré-lignes qui créent le différentiel qui permet à l'aile de se mettre en drapeau. Le différentiel étant trop court, il restait un reste d'arche qui a maintenu un résidu de puissance. Ce résidu de puissance, combiné au fait que l'aile est venue naturellement se placer en pleine puissance de la fenêtre, combiné aux kite loops qui ont du se produire, combiné à une grosse rafale, tout ça a démultiplié la traction de l'aile au lieu de la tuer.
Je précise que les réglages de la barres et donc des pré-lignes étaient à l'origine ceux d'une Skoop 17 m dont j'étais persuadé que la longueur du bord d'attaque était plus importante que celle de l'air 14 m... vus les événements de samedi, je n'en suis plus toujours aussi persuadé. Je serais intéressé de connaître ce qu'ont vu les témoins. Après tout cette version des faits n'est pas établie, c'est juste ce que je pense.
Les enseignements que j'en tire :
- vérifier régulièrement de manière complète les dispositifs de sécurité. Je vérifiais toujours le déclenchement du largueur. Et je m'exerçais à l'attraper pour que ça devienne un réflexe. Il aurait fallu que je largue dans un vent médium pour prendre réellement conscience que le résidu de puissance que gardait l'aile était potentiellement dangereux. Une aile moderne devrait a priori être plus sécurisante ;
- toujours surveiller le ciel pour anticiper les bourrasques le plus tôt possible ;
- tout cela a fortiori à marée haute quand les marges de sécurité diminuent.
C'est toujours une combinaison de risques qui aboutit à un accident. J'ai eu beaucoup de chance. J'e souhaite que cette expérience désagréable servira aussi à d'autres kiters.
J'espère à bientôt sur les spots de Bretagne de Vendée et d'ailleurs !
R1
PS : merci pour l'accueil des riders du coin. Je n'ai pas eu le temps de dire au revoir...