Rio aguila ou Sakalave, pas forcément simple comme job...

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fred bouflet
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Rio aguila ou Sakalave, pas forcément simple comme job...

Messagepar fred bouflet » lun. 30 août 2010 22:54

Bonjour a tous
Je m’appelle Fred Bouflet
Ce post n’est ni pour défendre Rio Aguila a Dakhla ou les lodges de la baie des sakalava a Madagascar. Mais je souhaite apporter mon témoignage sur les difficultés que l’on peut rencontrer dans l’exploitation d’une entreprise touristique en Afrique.

Je suis skipper propriétaire d’un cata avec le quel j’organise des trip kite et surf a Tuléar dans le sud ouest de Madagascar.
Les employés
Un cuistot, un gardien. A nous trois nous sommes au service des clients en saison (8mois dans l’année) et du bateau (toute l’année).
J’ai avec moi un cuistot à bord, Josselin, et nous travaillons ensemble depuis la création de l’entreprise (2006). C’est un bon cuistot (compétent, disponible et sympa) et nous nous entendons bien. Mais il n’en reste pas moins que la façon de fonctionner des asiatiques et des africains (Mada étant a cheval sur ces deux cultures) est très différente des Européens. Le travail n’a pas la même valeur ni le même sens et par conséquent la « conscience professionnelle » n’est pas celle que l’on connait en Europe.
Un jour il est arrivé bourré pour l’embarquement, je l’ai laissé a terre a la fois parce qu’il n’était pas raisonnable de l’embarquer et aussi pour lui faire comprendre que dans cet état, il ne pouvait travailler avec moi. Une autre fois il n’est carrément pas venu ! Il était parti en brousse avec toute sa famille pour la circoncision de son fils, événement très important a Mada (c’est une grosse fête qui dure plusieurs jours), il ne m’avait bien sur pas prévenu. A chaque fois, ça m’a obligé à prendre « a l’arrache » un autre cuistot, et forcément de par la méconnaissance du travail à faire, il était moins bon.
A chaque embarquement de l’approvisionnement du bord, je dois tout vérifier car les oublis (ou les vols) arrivent de temps a autre (des petites choses, mais très importantes en mer ou l’on n’a pas accès au ravitaillement si facilement).
Entre deux trip il n’y a parfois que 24H de battement pour refaire le réapro en eau et nourriture, le nettoyage du bord (changement de literies et autres) le tout sans pontons d’accès comme en Europe (avec toutes les commodités que ça implique), ici c’est échouage du cata a marée basse et charrette a zébu (ou mon 4X4) pour toutes ces opérations, parfois avec l’annexe si la marée n’est pas favorable, mais c’est moins pratique et surtout plus lent, il faut prendre des gars en plus pour accélérer la manip, le risque de vol de quelques produit n’est pas a exclure pendant les manutentions. On s’aperçoit par exemple, qu’une fois en mer qu’il manque le sucre alors que l’achat avait été effectué…
Des petits aléas de ce genre font partis de la vie dans ce pays, il y a peu de parade (mais en 4ans assez peu de problèmes à déplorer finalement).
Mon boulot est de veiller à ce que tout soit ok pour le trip, et s’il y a un problème c’est de ma faute, car je suis moi aussi perfectible, mais je dois aussi composer avec les gents qui travaillent pour moi, bien les payer et avoir de la considération pour eux ne suffit, hélas pas, pour que tout roule comme sur des roulettes…Ils n’on ni mes valeurs ni mes références et en tant que résident dans ce pays c’est a moi de m’adapter. Le personnel, est la force mais aussi le tendon d'Achile d'une l'entreprise a Mada.
Les clients.
Dans leur très grande majorités, ils sont vraiment cool et ça devient souvent des amis (a la demande de certains, je me suis décidé a crée une page Facebook pour y publier quelques trip, et permettre a ceux intéressés par un trip, d’avoir un contact direct avec ceux qui en ont déjà fait un).

Il faut dire que la vie à bord est assez confinée (ce n’est pas le même espace qu’un hôtel !) et ça resserre les liens entre les tripeurs. Mais il n’en reste pas moins que parfois il y a quelques surprises : genre deux gugusses qui se sifflent les 500gr de lait concentré en 2jours ! Ou un lot biscuits secs qui disparait mystérieusement (un gars se les tortore en douce dans sa cabine !) les surfeurs amis qui s’engueulent pour une session ou l’un a taxé les autres a plusieurs reprises (alors qu’ils sont les seuls sur le spot !) une fois a bord, ambiance tendue jusqu’a l’apéro ! Ou le type qui veut absolument que l’on aille (en cata) sur un spot au vent alors que ça souffle a 30nx et qui fait la gueule (et chier tout le monde) parce que j’ai décidé de ne pas y aller pour des raisons de sécurité (ça, c’est surtout les surfers qui ne se rendent pas compte des conditions de mer au large quand ça bastonne). Le gars en kite qui navigue un peu trop près au vent du cata, et l’aile se prend dans les haubans. Et quand il y a une fille a bord, c’est sur que les 300L d’eau du bord ne ferons pas tout le trip (les filles qu’est-ce que ça consomme comme flotte !), donc obligé de faire une escale a Tuléar pour refaire le plein (car ailleurs sur la cote ce n’est de l’eau saumâtre) 24H de perdu ! Et souvent les gars a cette occasion, s’éparpillent en ville pour divers petits achats (pilles pour le numérique, une bouteille de rhum pour l’apéro, etc) et il y en a toujours un qui se perd ou ne fait pas gaffe a l’horaire (normal c’est les vacances) de ré embarquement. Et les petites pannes mécaniques, (hélice qui casse sur une patate) il vaut mieux être très copain avec le concessionnaire de Tuléar (c’est mon cas) pour être dépanné a vitesse grand V, car le plus proche est a Tana la capitale (1000km de Tuléar) et l'eau dans l'essence (un classique!) qui pourri le carbu…

Et puis bien sur, il y a le groupe qui exige tout ou se croit tout permit sous prétexte qu’il a payé.
Et qui râle.
Ca ne m’est encore jamais arrivé, mais je redoute ce jour et mes réactions envers des gents qui penseraient que tout doit être conforme a leur attentes (et non a celles qu’on est en mesure de leur offrir compte tenu de l’environnement) et surtout a ce qu’ils s’imaginent d’un trip dans un tel pays.
Mais pour l’instant, tout se passe bien et toutes les situations décrites plus haut sont plutôt drôles après coup, et les trips se déroulent dans la bonne humeur générale.
Un trip qu’il soit a terre ou sur mer, dans un pays sous développé est d’abord une aventure avant d’être un « séjour ». Ceux qui partent dans cet état d’esprit en reviendrons avec l’envie de repartir vers d’autres découvertes du même genre, les autres aurons plus de mal, une partie s’adaptera et prendra quelques précautions pour le prochain trip, une autre s’adaptera sans rien dire mais ne recommencera pas de si tôt, et un autre, râlera et ne recommencera peut être jamais.

Voila c’était le coté intendance d’une (très) petite entreprise touristique a Mada (l'arrière boutique quoi!).
Encore une fois ce n’est ni pour défendre Rio Aguila a Dakhla ou les lodges de la baie des sakalava. Juste apporter un éclairage sur l’envers du décor d’un trip (quel qu’il soit) et que vivre et faire un job dans un lieu de rêve dans un pays sous développé n’est pas forcément simple.

Mais avec un minimum d’ouverture d’esprit et de tolérance tant de la par des clients et (surtout) de l’organisateur ou responsable du trip, tout se passe bien.
Merci de m’avoir lu jusqu’au bout
Bon vent a tous
Veloma tompoko (salut a vous)

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Kiteloco
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Messagepar Kiteloco » mar. 31 août 2010 14:30

Ce qui n'est pas simple c'est de vouloir s'inventer le métier d'hotellier où de restaurateur en Afrique où ailleurs.
Mais je pense que votre "job" est beaucoup plus simple, que celui des locaux que vous "employez".

fred bouflet
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Messagepar fred bouflet » mar. 31 août 2010 20:07

Salama Kiteloco
Ta réflexion est juste. Bien des entrepreneurs (qu’ils soient locaux ou d’origine Européenne) qui créent une entreprise hôtelière et/ou de restauration en Afrique ont peu ou pas de compétences dans le domaine et ils se forment sur le tas. Ca n’empêche pas un bon nombre d’entre eux d’êtres bon dans ce qu’ils font, et tant mieux pour nous (je suis un client comme toi, lorsque je me déplace dans le pays et que je dois aller à l’hôtel).
Les mauvais ne sont pas la majorité.
Pour ce qui est de la simplicité de mon job (et donc la facilité à l’exercer) par rapport a mes employées. Je ne saisis pas bien ce que tu veux dire par là. La simplicité d’un point de vue engagement physique, intellectuel, financier ? Autre ?
Ou peut être as-tu voulu dire que c’est ma vie qui est plus simple par rapport a celle mes employées ? (autre question : pourquoi mets tu le mot « employez » entre guillemets ?)
Bien à toi
Veloma


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